Tous les ans c'est pareil. La période des vœux, c'est sympa mais un peu ... fastidieux.
Il faut essayer de trouver un truc original, motivant à dire et pas chiant à lire !
Pas facile pour 2018 ? Pas facile, si on veut rester objectif, alors quelle option ?
On peut la jouer simple « Bonne année, Bonne santé » et le tour est joué !
Ou parler moto, raconter une histoire, de bécane , de motard. Par exemple ?
2018 ! Tiens, ça fait tout juste 50 ans depuis... 1968 !
Anniversaire intéressant, non ?
Pour beaucoup 1968, c'est loin, ça ne signifie rien, mais 1968 a été l'année de beaucoup de passions, de toutes les espérances et un sacré symbole pour toute une génération.
On ne connaît pas encore de limitations de vitesse, il y a de la musique pop, du rock et des belles bécanes !
En face de ça, que nous proposera 2018 ? Les atouts en paraissent tièdes...
1968-2018, ça fait un demi-siècle, combien de motos depuis, de kilomètres ? .
A y songer, pas vraiment de regrets à avoir sur cette période !
Mais bon, comme j'y étais, alors une rétrospective s'impose soudain, après tant d'années, en forme de question :
- Après tout ce temps passé que sont devenus les motos et … les motards ?
Autant qu'il m'en souvienne, c'est à partir de 1968 que j'ai commencé à m'intéresser à la moto et à ce que cela pouvait représenter de mystères ou de sensations.
Il faut dire que j'allais accéder au Saint Graal. Bientôt quatorze ans, et la possibilité de « piloter » un cyclomoteur, avec la perspective de transformer les rêves en aventures.
En 1968, l'épopée du Continental Circus bat son plein, avec Jack Findlay, Phil Read, Renzo Pasolini, Peter William, Alberto Pagani, Rodney Gould et bien sûr Giacomo Agostini, qui engrange les victoires. Double champion en 350 et 500 cette année-là
Sur les circuits, les marques sont alors prestigieuses et surtout multiples; des Norton, Matchless, Seeley, Benelli, Paton, Linto, CZ, Triumph et bien d'autres ; il y a même en dix neuvième position du classement un russe avec une CKEB, ça s'invente pas !
En 350, les six premières places sont tenues par MV Agusta, Benelli, Aermachi, MZ, Bultaco, Jawa.
La première japonaise, qui est une Honda, arrive en 9è place...c'est à partir de 1968 que l'on commence vraiment à les voir sur les podiums ces putains de jap's.
En 250, Phil Read et Bill Ivy les font couiner et gagnent avec des Yamaha ; 1968 est la dernière année ou une MZ montera sur le podium du championnat du monde de la catégorie : une page va bientôt se tourner...
Qui se souvient de tout ça, alors qu'aujourd'hui les marques du championnat se comptent sur les doigts d'une main.. ?
Bon, 1968, c'est aussi l'année ou je vole mon premier deux roues ; un Vespa, avec lequel je vais me vautrer au bout de cinq cent mètres d'une échappée sans gloire. Le tas de tôle versatile n'aura pas eu de mal à avoir raison tant de mon incompétence que de ma musculature d'ado de type flan aux pruneaux !
1968, La « révolution » se termine bientôt à Paname, comme un peu partout en Europe d'ailleurs ( ça n'aura pas duré longtemps ! ) , la neige retombe dans la boule à veaux et tout redevient « normal ». Le grand con à gros pif revient au pouvoir et partout les ringards sont soulagés : Ordre et sécurité leur permettent de continuer à consommer.
L'année suivante sera pour moi une année ...« exotique ».
Je monte d'un cran et je renouvèle l'expérience en m'essayant sur une BSA Golden Flash béquillée au coin de ma rue. Mais cette fois-ci, mauvaise pioche, car c'est la bécane d'un ancien blouson noir de Paname « repenti » qui s'est mis au vert dans notre belle petite ville du sud-ouest... Le type me surprend et il me traîne dans son bouclard pour « m'apprendre la vie »;par la suite, pas rancunier, ce sera la mécanique. C'est avec lui et l'un de ses potes du même tonneau que pendant trois ans je vais faire mes premières armes motocyclistes, entre BSA et Zundap.
Accéder à la moto à cette époque n'était pas qu'une question d'envie, c'était souvent un parcours initiatique validé par le parrainage des anciens.
On y apprend alors à être autonome pour être libre.Un motard est forcément mécano.
Que dire de plus sur cette époque ? d'une jeunesse en tourbillon, de ce premier cuir avec, dans le dos déjà, un oiseau à tête de mort ; les balloches souvent, les bastons parfois, les filles un peu ; puis par la suite le long ruban et les concentres.
Au fil des ans, on ne sait plus vraiment pourquoi on continue à rouler en bécane...
Mais pourquoi je vous raconte tout ça ?
Ah oui, on en était à : « 2018... que sont devenus les motos et … les motards ? ».
Au début des 70', donc, pour ce que je m'en rappelle, le monde moto relève d'une dimension un peu à part, un sacerdoce calé entre la nécessité de se déplacer et une certaine idée de la liberté... on roule avec ce que l'on peut, ce que l'on « trouve » , on commence souvent à rouler avec de vieilles françaises rondouillardes dénichées par hasard dans la grange d'un papi ou au fond du garage d'un mécano philantrope.
On découvre les premières japonaises, si colorées, entre admiration et incrédulité...
Ensuite, sur un jour d'« embellie », un coup de folie, on s'achète un brelon neuf ; moi après un essai peu convaincant de quelques mois avec une 125 nippone, je reviens aux fondamentaux...
Par conscience philosophique plus que par esprit partisan !
Il n'y a plus vraiment d'anglaises, encore moins de françaises, alors pour moi les italiennes vont se succéder, Benelli, Ducati, Laverda, Guzzi ; pendant... longtemps ! .
Par la suite, le fil se distend entre pro- et non-japonaises; La société, le fric, le « progrès »... On nous catalogue, on nous trie ! Le système se démène d'une manière détestable pour diviser avec ses lois et régner sur ce monde moto un peu trop rebelle.
Bientôt, c'est la fin des trente glorieuses, le monde autour de nous baigne dans une atmosphère étrange qui laisse entrevoir que l'humanité s'engage sur un drôle de chemin. Entre les marées noires, le nucléaire et la mise en coupe réglée de la planète par les amerloques et leur NSA, ça pue … déjà.
« Mais là-bas près du comptoir en bois, nous on est là... », tout ce monde là nous gonfle . En fait, c'est pas compliqué, nous on veut juste : la liberté, la route au son des mégaphones avec une certaine fureur de vivre.
Pas trop de boulot, faire ce que l'on veut de notre vie et rouler avec nos bitzas improbables.
Au fil du temps, on constatera que « d'autres en ont décidé autrement » !
Les roues tournent, le temps passe et les images défilent dans le rétro.
La société va de plus en plus vite ; moi, par réaction... de moins en moins !
Nous voici en 2018. Bon, alors, où en est le monde de la moto et des motards ?
En fait, quand je lis les journaux ou que je regarde la télé, tout va pour le mieux.
Pas de quoi flipper ! La moto s'est « démocratisée » , banalisée, standardisée.
Et puis sur la route, c'est comme sur internet, on a tout plein d'amis...
- On se fait doubler par des playmobils bon chic bon genre, qui roulent sur des aspirateurs et qui glissent le pied au ras du sol pour te dire bonjour,
- On croise des bobo-bicoeur en mal de fraternité qui chevauchent des Vôtouines « bleu- blanc-frime » et qui pleurent la mort d'un johnny à franges,
- On est infiltré par des gourous de la sécurité en chasubles fluo.
- On se fait des grands V en cuir avec les doigts, mais il n'y a plus grand monde pour s'arrêter quand t'es vraiment sorti de l'asphalte. Il faut dire que désormais avec le tout électro-nique, on ne dépanne pas, monsieur, car depuis l'avènement de l'intelligence artificielle, plus de temps perdu à bricoler ( ! ), on prend son Aïpaude et on appelle SOS-Cambouis :
T'es pas connecté, tu sèches sur le bas-côté !
En revanche, sur le bas côté, on a parfois des...opportunités.
La moto de « papa », c'est devenu ringard ou collec' et un de ces jours les bitzas ou les chops seront interdits . Même le « pote » Macron commence à baliser ! On va tous bientôt évoluer en électro-spoutnik et porter l'uniforme réglementaire du citizen-bike... Pas sûr que ça sauve cette putain d'humanité ?
Alors, pour cette année 2018 où l'on nous promet l'extase d'un avenir pittoresque et sécurisé à 80 km/h, j'essaie de rester positif, mais j'ai du mal à optimiser la prose...
Entre le réchauffement climatique qui ramollit le cerveau des peuples et la démocratie participative qui optimise les impôts des plus riches, on est pas rendus. Mais bon, il nous reste encore de belles marges de manœuvre pour saper le système ...
Alors, en restant sérieux... pour 2018, qu'est-ce que l'on peut se souhaiter ?
On va rouler en 2018, bien sûr, sur le grand ruban, encore et toujours, pour la passion, pour la liberté d'aller voir plus loin si il y a toujours des bistrots et des potes.
On va continuer à faire vivre nos rêves de liberté sur les chemins de traverse .
« On vous souhaite tout le bonheur du monde,
Que votre chemin évite les cons » .
Finalement, il n'y a pas tant de différence entre 2018 et 1968 :
- des cons, il y en avait déjà, et des beaux !
C'est là le côté rassurant des choses, même si le temps passe, certaines choses sont éternelles …
2018 promet donc d'être certainement une belle année que je souhaite à toutes et tous pleine d'aventures en bécane, en suggérant toutefois cette devise pour bien les vivre :
Autonomie , Résistance , Fraternité.
Hirsute Le Loup Blanc
Préz' / Moto Club ISLANDERS
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